Le sport est un terrain compliqué, fascinant, où la vision, le geste, jouent un rôle essentiel. Comprendre avant tout le monde le circuit de transmission d’un ballon peut renverser un stade et son public de dizaines de milliers de spectateurs.
Dans ce qui peut ressembler à une chorégraphie improvisée et jamais prévisible, le football déplie ses possibilités, ses hypothèses, comme un coup de dés sans cesse répété à chaque seconde, qui comme le disait Mallarmé « jamais n’abolira le hasard ». Dans le football, il y eut (beaucoup), il y a (peut-être moins), des artistes : des joueurs invités à créer le jeu. C’est quoi créer ? Avoir une perception et une conscience de l’espace, des mouvements, de l’inflexion et d’y jouer son rôle : une ouverture sur l’aile, une passe dans l’intervalle, un appel en profondeur.
Qu’un grand artiste mondialement célébré s’intéresse dans toute la mesure de ses moyens au sport est une aubaine et fait événement. Il se trouve que Tino Sehgal, réticent à l’enregistrement, lié au « live », au « direct », a accepté de mener cette entreprise énorme et inédite : traduire les gestes et les visions du sport dans une piece notamment inspirée de ceci : ce qu’un grand sportif de haut niveau, Juan Mata, champion du monde avec l’Espagne et par ailleurs longtemps joueur phare de Manchester United, a pu lui raconter ou transmettre ou faire sentir de son regard et de son rôle de créateur, ou encore de la temporalité d’un match, avec ses dilatations, ses raccourcis.

« En regardant This Entry, je me sentais proche de l’intensité de regarder le football. Les deux impliquent de porter une attention particulière à un autre être humain et de ressentir une sorte de proximité, une affinité. C’est ce que j’attends de l’art, et du football aussi. » Orit Gat, ArtReview