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Autrice et metteuse en scène, Estelle Savasta a repris en cours de route le projet initié par Fabrice Melquiot.


Vous avez dû vous glisser dans un projet déjà engagé, comment avez-vous fait ? J’ai décidé de tout reprendre à zéro. Je pars toujours du principe qu’écrire est terrifiant, vraiment, donc j’essaye de faire en sorte que ce soit le plus rassurant possible en proposant une trame très précise pour que même ceux qui ont un problème avec l’idée d’écrire puissent participer. Je les ai fait travailler sur les photos de l’Américaine Julia Blackmon car elles laissent une grande liberté d’interprétation. Chacun en sélectionnait une et choisissait un personnage. A partir de là, je leur posais des questions liées à des sensations physiques : qu’est-ce que tu ressens sous tes pieds ? Qu’est-ce que tu vois, qu’est-ce que tu entends ? Ils pouvaient répondre en une ou dix phrases mais toujours à partir de leur personnage. Quand on écrit, on parle toujours un peu de soi mais sans forcément s’en rendre compte. Ceux qui n’avaient pas envie d’écrire pouvaient s’en tenir à des réponses qui, mises bout à bout, donnaient un texte et ceux qui avaient envie de s’envoler, avaient la place pour ça.

C’est un dispositif que vous aviez déjà expérimenté dans d’autres ateliers ? Je ne fais pas beaucoup d’ateliers d’écriture et je m’ennuie vite si je fais deux fois la même chose, donc à chaque fois j’invente un processus pour l’occasion. Celui-ci a donné des textes très personnels même pour ceux qui sont restés près de la consigne… On avait imaginé une restitution dans l’hôpital, un lieu très beau dans le XIe arrondissement, où le public serait en bas et les participants aux fenêtres avec lancé de poèmes… Quand on a compris que ça ne pourrait pas se faire, nous avons décidé que les capsules sonores de Ruppert Pupkin deviendraient la restitution. Elle a enregistré et on a travaillé ensemble sur le choix des textes, le montage. Ce sont les voix des participants que l’on entend mais pas toujours les voix de ceux qui ont écrit. Emmanuelle (Ruppert) voulait vraiment faire un travail de création d’où les arrangements, le son très travaillé.

Est-ce que le contexte psychiatrique vous a semblé difficile ? Je me dis toujours que je m’adresse à des individus avec des parcours particuliers. Il y avait des âges très différents, des pathologies très différentes, donc difficile d’en tirer des généralités. A chaque fois que j’interviens auprès de gens qui n’ont pas forcément choisi de faire un atelier d’écriture, je fais particulièrement attention. Mais c’était un peu court, ça m’a surtout donné envie de recommencer

Propos recueillis par Maïa Bouteillet


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