L'Histoire
L’histoire du Théâtre de la Ville est une épopée fantastique.
L’histoire du Théâtre de la Ville est une épopée fantastique. Forteresse au début du XIIe siècle, elle est détruite en 1802, puis remplacée par deux théâtres en 1860 conçus par Gabriel Davioud, architecte fétiche du baron Haussmann : le Théâtre du Châtelet et le Théâtre Lyrique. Ce dernier est incendié en 1871 pendant la Commune, rénové en 1875 d’abord rebaptisé Théâtre Historique puis Théâtre de Paris. En 1887, il accueille l’Opéra Comique ravagé a son tour par un incendie, décidément !
En 1899, Sarah Bernhardt prend possession du lieu, lui donne son nom et y lance des travaux somptueux. Elle le dirigera avec panache pendant 24 ans jusqu’a sa mort en 1923. A la victoire du Front populaire, il devient un temps Théâtre du peuple puis Théâtre de la Cité, nom imposé cette fois par l’occupation allemande a son directeur Charles Dullin.
En 1949, il est rebaptisé Théâtre Sarah Bernhardt puis deviendra Théâtre des Nations avec le prestige que l’on sait.
En 1966, la Ville de Paris entreprend une importante restructuration confiée aux architectes Valentin Fabre et Jean Perrottet : sa façade seule est conservée, la salle a l’italienne est détruite et remplacée par une volée de 1000 fauteuils avec une visibilité parfaite pour tous. C’est la naissance du Théâtre Municipal Populaire qui prend alors son nom actuel de Théâtre de la Ville. Sa direction est confiée au metteur en scène Jean Mercure qui imagine un projet basé sur « l’art dans la diversité de ses formes théâtrales, chorégraphiques et musicales ».
En 1985, il passe le relais a Gérard Violette qui en était administrateur général et a fait partie de ses bâtisseurs. Gérard Violette y développe le projet de Jean Mercure et invite tous ceux qui deviendront les grands noms de la scène chorégraphique mondiale, faisant ainsi du Théâtre de la Ville un lieu phare de la danse contemporaine.
Pendant la rénovation du Théâtre de la Ville, toutes ses équipes se sont installées à l’Espace Cardin, entièrement réhabilité par la Ville de Paris, ce qui est une marque d’engagement et de profond soutien que je tiens à saluer et à remercier ici. Alors que nous investissons notre résidence provisoire, le Théâtre de la Ville est quant a lui confié aux architectes Marie-Agnès Blond et Stéphane Roux pour une rénovation aussi ambitieuse que nécessaire qui en fera, nous l’espérons, un grand Théâtre du XXIe siècle.
Le Théâtre de la Ville. C’est un lieu que l’on aime, c’est une idée, c’est une pensée, celle d’un art qui respire, de rencontres qui inspirent. On aime ce Théâtre pour le moment ou l’on y reconnaît l’autre, car c’est ici son accueillante maison. Un lieu pour l’hospitalité.
On y aime les mots, le son des mots, celui des langues, même celles qu’on ne parle pas. L’amour du geste, des mouvements, de la musicalité, de l’inconnu, de l’étranger, des répertoires inouïs, de ce qui nous y surprend, nous effraie, nous dérange parfois, nous bouleverse souvent. Un lieu pour l’avenir. Un pont entre le XIXe, le XXe et le XXIe siècle.
Pour nous, il s’est toujours agi de savoir mettre a l’honneur ce qui a été fait avant nous et de le poursuivre tout en le réinventant. D’inscrire le passé, avec force, dans le présent et pour l’avenir. Cette conviction et mon amour pour la danse m’ont poussé a poursuivre dans la durée les liens avec les chorégraphes, a m’engager a leurs côtés pour accompagner leurs créations, défendre leur répertoire et élargir leur public.
Maguy Marin, Jérôme Bel, Anne Teresa De Keersmaeker, Boris Charmatz, le Tanztheater Wuppertal-Pina Bausch, et tant d’autres trouvent donc ici leur maison hospitalière.
Ainsi que les prodiges de la musique du monde comme Shahram Nazeri, Nusrat Fateh Ali Khan, Chaurasia, Ballaké Sissoko, Homayoun Sakhi…, qui donnent au Théâtre de la Ville ses heures d’éblouissement. Mais je voulais aussi ouvrir à d’autres continents, à l’Afrique d’Andréya Ouamba ou de Faustin Linyekula, a la Corée de Eun-Me Ahn, la Chine de Tao Dance Theater, ouvrir à Israel Galván, Hofesh Shechter et Dimitris Papaioannou, au hip-hop d’auteur de Wang Ramirez. Effacer les frontières, élargir les cultures et les pratiques. J’ai souhaité que le Théâtre de la Ville renoue avec une autre part de son héritage, celle léguée par le Théâtre des Nations, et qu’il puisse accueillir a nouveau les Théâtres et les langues du monde. Ainsi, retrouver 55 ans plus tard le Berliner Ensemble – qui n’y était pas venu depuis Brecht et la soirée légendaire de juin 1954 – d’abord, en 2009 avec l’inoubliable Opéra de quat’sous mis en scène par Robert Wilson, puis avec tant d’œuvres majeures qui sont autant de joyaux du Théâtre européen ou mondial d’aujourd’hui. Notre ami Patrice Chéreau a pu y présenter ses deux dernières créations. Une relation s’est inscrite avec une nouvelle génération, Thomas Ostermeier, Ivo Van Hove ou Romeo Castellucci qu’il nous a fallu un temps (et encore tout récemment) défendre contre l’obscurantisme qui voudrait interdire sa parole..