Jan Fabre, Jan Lauwers et Anne Teresa De Keersmaeker réunis semblent s’être penchés sur son berceau. Au début des années 1980, la « nouvelle vague flamande » qu’ils incarnaient n’hésitait pas à porter « l’énergie aux limites du possible », comme titrait alors la revue Alternatives théâtrales. Bien des années plus tard, Jan Martens ne renie pas cet héritage.
La séquence finale du duo Fase d’Anne Teresa De Keersmaeker fut ainsi l’une des sources d’inspiration pour The Dog Days Are Over, variation autour du saut pour huit danseurs bondissants (1). En solo, on retrouve dans Ode to the Attempt semblable appétit pour la dépense physique, dans l’affolement du mouvement, cependant maîtrisé et parfaitement affûté, lancé à sa propre poursuite. Mais il y a plus, dans ce solo en forme d’autoportrait. Entre playlist musicale et textes projetés, Jan Martens ouvre en quelque sorte son carnet de création, condensé dans la mémoire de son ordinateur, « qui est tristement mon compagnon la plupart du temps », disait-il dans un entretien où il confiait encore : « comme si je réécrivais encore et encore, dévoilant sur scène le processus de création, je superpose différents vocabulaires pour un même mouvement*. »(2) C’est alors en toute simplicité, dans une authenticité teintée d’humour, que Jan Martens partage la densité de son élan, et l’on se réjouit de ce qu’une telle liberté peut avoir de naturellement effronté.
Jean-Marc Adolphe

(1) The Dog Days are Over a été présenté par le Théâtre de la Ville en janvier 2016.
(2) Jan Martens, figure libre de la nouvelle vague belge, entretien avec Philippe Noisette, Les Inrockuptibles, 25 janvier 2016.