UN FADO QUEER MILITANT
Fado Queer, Fado Pédé, Fado Folle, voilà comment on pourrait traduire Fado Bicha, duo de fado qui twiste le traditionnel chant portugais de façon queer. Ce projet créé par Lila Tiago et João Caçador nait d’une volonté claire et politique : faire du fado un espace d’expression militant au travers des identités queer des deux musiciennes en s’inspirant des milieux underground du XIXe siècle, lorsque le fado était chanté dans les bordels et les tavernes bon marché et était un moyen de libre expression des exclus de la société.
Si elles s’inscrivent pleinement dans le patrimoine du fado, Lila et João souhaitent explorer le genre en dépassant avec vigueur les barrières qu’il représente aujourd’hui. C’est ainsi, par exemple, qu’elles sont vétues de couleurs, paillettes, robes et extravagances alors que le fado est plutôt connu pour sa sobriété (voire son austérité) et représenté par des musiciens généralement vêtus de noir, invitant son public à faire silence. Les Fado Bicha, elles, convoquent la fête, la libération du corps et des mœurs tantôt en racontant les amours entre un pêcheur et un poissonnier (Namorico do André ; L’amourette d’André), tantôt en évoquant l’histoire d’une queer activiste (Lila Fadista), tantôt en questionnant l’immobilisme politique du peuple portugais (Povo pequenino ; Petit peuple). Elles remplacent les traditionnelles guitares portugaise et classique par une guitare électrique et convoquent de plus en plus des sonorités électroniques grâce à Larie (aka Labaq), multi-instrumentiste queer brésilien·ne, troisième membre du groupe depuis 2022. En plus de leurs compositions, les Fado Bicha reprennent certaines chansons du patrimoine portugais comme celle de la grande diva Amália Rodrigues en transformant, parmi d’autres, sa Lisboa não sejas francesas (Lisbonne ne soit pas française) en Lisboa não sejas racista (Lisbonne ne soit pas raciste).
Avant Fado Bicha, Lila Tiago chantait seule dans les rues de Lisbonne, notamment dans certains bouisbouis d’Alfama, là où d’aucuns disent que la Fado est né. Aujourd’hui, le groupe est devenu un des incontournables de la nouvelle scène musicale portugaise, s’inscrivant dans la lignée d’António Variações (années 1970/80). Après plus de 250 concerts en Europe et avoir été acclamées dans la dernière création de Pedro Penim, directeur du Théâtre National de Lisbonne, elles donnent leur premier concert solo à Paris.
Lila Tiago – paroles, voix.
João Caçador – compositions, guitare, voix, claviers
Larie – samples, voix, trompette, guitare acoustique
Sebastião Mascarenhas – création lumière
sam. 27 mai 2023
20:00
5 € à 20 €