La Qâdiriyya est une des confréries soufies les plus populaires. Elle remonte à ‘Abdulqâdir Jilâni (1077-1166) qui selon certains était originaire de Geylân au Kurdistan. Au début du XVIIIe siècle, elle a prospéré dans cette région en diverses branches (khândân) qui possèdent chacune ses propres centres et délégués (khalife). La branche Kasnazâni dont le centre est à Bagdad, compte de nombreux foyers des deux côtés de la frontière irano-irakienne. Les hadra ou assemblées de dévotion qâderi suivent un modèle répandu dans la plupart des confréries qui consiste en prières et litanies en arabe (wird) et en formules scandées (zikr) tirées du Coran ou des noms divins. Les Qâderis kurdes se distinguent parmi tous les derviches du Moyen-Orient par leur répertoire de chants en kurde, en persan et en arabe accompagnés par des grands tambours sur cadre (daf) et des timbales (tabl), battant des rythmes spécifiques. Ces chants interviennent dans la phase méditative de pure audition (samâ’ avec zikr intérieur, khafi), ainsi que dans la phase de scansion (zikr jahri) qui se fait debout (zekrqiyam ou here). Les derviches coordonnent alors leurs mouvements corporels et portent l’émotion à son plus haut degré d’intensité, contribuant à actualiser une « présence épiphanique » (hadra) qui est la finalité ultime du rituel.